Eco-bonheur durable

Augmentation du nombre des bénévoles, fidélisation des spectateurs, multiplication des mécènes : pour sa 3e édition, le Festival des Petits Bonheurs ne se contente pas de créer l’événement sur les plateaux de la Margeride mais confirme sa place et sa légitimité dans l’été culturel cantalien.

Le succès en partage

L’équipe des Baladins de la Margeride, regroupés dans une association intergénérationnelle active, a de nouveau démontré son savoir-faire et son intelligence des questions culturelles et environnementales, le samedi 7 août 2010 à Védrines St Loup. Des mois entiers de préparation et de promotion, plusieurs semaines de montage énergique. Don d’énergie et de temps, don de soi pour faire connaître un terroir et donner des heures de bonheur en partage.


Récupérations

Les Baladins sont passés maîtres dans l’art du recyclage et savent désormais faire bar et comptoir de tout bois. Palettes et cagettes se vissent, genêts et branches se ficellent, planchettes et chutes de parquet s’assemblent en de superbes meubles ou structures utilitaires. Ingéniosité et beauté des dispositifs de recyclage dont l’esthétique 100% écologique évoque les « installations » de nos musées d’art contemporain. Des heures de conception, des semaines entières de collecte, de stockage et de travail pour construire un ensemble vivant et cohérent, où la main de l’homme façonne des objets culturels qui spontanément s’intègrent au cadre naturel de la Margeride. Ici, la notion de « développement durable » est une réalité qui se vit et qui se construit à la sueur de son front. Aux slogans galvaudés, à l’éco-citoyenneté rhétorique, les Baladins préfèrent une réalité sobre et humble, honnête et déterminée, celle qui, d’année en année, permet de construire d’autres cadres, d’autres logistiques pour faire la fête, celle qui éduque le festivalier et valorise l’environnement au lieu de l’abîmer. On loue ou on achète sa carafe et son gobelet. On déguste son snack végétarien, sa saucisse frite ou son menu régional avec des couverts en bois ou dans des cornets ou des barquettes compostables. On économise l’eau et le détergent en utilisant des toilettes sèches. Et si on veut en savoir davantage, on s’informe au stand du syndicat des Cramades, où une ambassadrice du tri sélectif vous attend pour commenter vitrines et panneaux.


Concours, jeux et spectacles en balades

On aurait pu craindre que le format du « festival » ne porte un coup fatal aux activités plus traditionnelles, typiques des fêtes de village. C’est oublier que les modernes Baladins sont aussi gens de terroir. Une partie de pèche ou de boules ? Un apéritif entre amis ? Pourquoi se les refuser ? Dès 8h, rendez-vous est donné autour du plan d’eau, pour attraper un maximum de truites… ou pour l’initiation des plus jeunes. Un verre plus tard et le grand concours de pétanque s’ouvre.

Plus originale, la grande « balade des petits bonheurs » fait un clin d’œil à la tradition, en incluant une chaise musicale jazzy dans le pré et un relais en forêt. Clin d’œil seulement, car rien n’échappe à la thématique environnementale de la promenade : ce qu’il faut récupérer dans ces jeux, n’est pas tant un siège ou un bout de bois… qu’un déchet (promis au recyclage).

La balade est par essence un moment identitaire fort de nos Baladins. On marche ensemble, on se parle, on sympathise. On s’asseoit les uns à côté des autres lors des haltes : un avant-concert donné à la lisière des bois de La Fage (guitare, accordéon, percussions) ; des leçons d’écologie pratique données aux adultes, autour de ballots de résidus compactés ; des jeux pour les enfants… Il commence à faire faim ? Voici un grand goûter à partager, préparé par les villageois. Pour clore la marche, un spectacle de cirque aérien, physique et métaphysique, donné par la Compagnie Kaoukafela, sur les hauteurs d’un champ. Corps, écharpe et valise se détachent sur l’horizon immense et le ciel transparent : les spectateurs sont saisis. Ce qui n’était qu’un pré est devenu une scène révélant nos espaces intérieurs mais aussi la beauté des cimes et des hauts plateaux, qu’un jeu d’acrobaties a su faire jaillir.

On redescend enfin au village où le grand spectacle de la fin d’après-midi est prêt : Domi and Claude (Carnage Production) ont installé leur roulotte foraine. Leurs maladresses calculées et leurs facéties, leurs numéros périlleux faussement ratés (« la cale humaine », « les oiseaux de la mort »), leur capacité étonnante à deviner le caché enchante les quelque 300 festivaliers pressés autour d’eux.


Concert sous les Etoiles

Même en été, il peut faire frais à plus de 1000 m, sur les hauteurs de Védrines St Loup. Mais la douceur exceptionnelle de ce samedi 7 août 2010 enveloppe le concert de clôture jusqu’à tard dans la nuit. Les groupes invités (Gueules d’Aminche, Les Barbeaux, Les Quatre Fers en l’Air) achèvent de donner à ce Festival la stature… d’un festival, ouvert aux amateurs de musiques amplifiées, avec une énergie contagieuse, un foisonnement rythmique et stylistique étourdissant.



Alors que les équipes démontent et nettoient, chacun évoque déjà la 4e édition. Rendez-vous est donc pris pour l’an prochain au 6 août, puisque ces petits bonheurs là sont nés pour grandir et pour durer.




écrit à Védrines Saint-Loup le 10 août 2010
Jean-Rémi LAPAIRE